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17- L’ère de la liberté

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Albert : Instinct, rationalité, moi humain… Ce sont là des termes que vous utilisez sans suffisamment justifier à mes yeux leur apparition dans votre exposé.

— Nous aurons le loisir de vérifier le bien-fondé de ces notions si nous persévérons dans notre patiente exploration du réel. Pour clarifier ces concepts et mieux assimiler l’univers mental auquel ils contribuent, un bref regard sur nos arrières pourra s’avérer utile.

Très tôt dans sa démarche évolutive, la substance vivante a privilégié la mobilité animale plutôt que la stabilité végétale. Cette orientation a relégué la vie végétale au rôle d’accessoire de la croissance générale de la vie sur notre planète. Corollairement, elle a eu aussi pour effet de favoriser l’essor de la conscience dans le règne animal.

Chez les multicellulaires, l’option de la conscience implique encore l’élargissement de l’intériorité en parallèle au développement de plus en plus poussé d’organes de communication et d’adaptation. Une intériorité dont nous pouvons mesurer l’amplitude en étudiant le double détermi­nisme du comportement.

D’une part le comportement peut être commandé par une pulsion inté­rieure dite instinctuelle. D’autre part, la conscience réagit aux conditions externes. Il y a donc une cause extérieure du comportement qui est con­ditionnée par les sens ordonnés à la matérialité du monde, et une source intérieure, tributaire de l’instinct enraciné dans le terreau vital.

Au palier de la conscience réfléchie, celui dans lequel l’humanité évolue, nous retrouvons encore cette double morphologie du comporte­ment. Toutefois, en s’appuyant sur une structure considérablement plus évoluée, la substance vivante se trouve à exprimer son dynamisme de manière plus complexe. Au lieu que le comportement soit conditionné exclusivement par les sens, c’est la rationalité qui entre en jeu pour le monde externe. Tandis qu’à l’interne, le moi occupe la place de l’instinct.

Pour comprendre comment s’opère cette double substitution, commen­çons par définir la rationalité. Je décrirai cette noble faculté comme une capacité de saisir, au-delà du tangible, des réalités inaccessibles aux per­ceptions sensorielles. La rationalité se substitue aux sens en élevant la cons­cience à un niveau qualitatif qui les transcende. Lorsque je conçois le mot arbre, j’accède à un ordre de réalité qui dépasse l’apparence de la chose que mes yeux perçoivent.

Les animaux ne peuvent pas concevoir un arbre parce qu’ils sont incapa­bles de se hausser au-dessus des images sensorielles. Les sens perçoivent des choses séparées sans connexions entre elles. Tandis qu’en procédant par rap­prochements et associations, en saisissant les rapports invisibles de cause à effet qui relient les réalités entre elles, la rationalité peut conclure, par exemple, que tel organisme doté d’ailes et de plumes est un oiseau.

— À force d’accumuler les images de différentes espèces, elle finirait par concevoir le genre oiseau ?

— Pas tout à fait ! La rationalité ne parvient pas à cette notion par simple contact sensible avec un grand nombre d’espèces d’oiseaux. La surim­pression d’images ne donne pas accès à la raison. Il faut supposer beau­coup plus. Vous pourriez faire défiler les images de tous les arbres qui existent devant un cheval qu’il n’aurait pas accès à la notion rationnelle d’arbre pour autant. Car il ne possède pas la faculté d’abstraction lui per­mettant d’extraire les caractères communs à tous les arbres.

Le mot-clef, ici, c’est l’abstraction ! Elle s’accomplit par une sorte d’ar­rachement, une distanciation des images renvoyées par les sens. Je peux dire que telle perception sensible est un arbre parce que tous les arbres possèdent un tronc, des branches, des racines, des feuilles, etc. J’ai extrait des images perçues les caractéristiques applicables au genre arbre. Et si j’approfondis, je peux dire que tel arbre est un chêne parce qu’il cumule les caractères communs à cette espèce.

— Qu’est-ce qui démontre que cette abstraction atteint la réalité ? Qu’est-ce qui prouve la véracité des déductions de la raison ?

— La rationalité peut errer dans ses déductions. Elle peut se tromper, particulièrement lorsqu’elle juge en se basant sur l’apparence, soit sur les seules perceptions sensorielles. Mais une preuve que cette faculté est capable d’atteindre la réalité tient, par exemple, dans la notion de l’espèce. Du gland d’un chêne on ne verra jamais pousser un sapin mais bien un autre chêne. C’est la preuve que le concept de l’espèce est fondé dans la réalité. Est juste également la déduction que ce chêne est un arbre, donc du règne végétal. Pour émettre cet énoncé, j’ai dû associer trois concepts qui se rattachent à la réalité : l’espèce du chêne, le genre arbre et la vie végétale.

Si je poursuis ma démarche rationnelle, je pourrai relier ensemble d’autres énoncés de manière à effectuer un raisonnement. Plusieurs raison­nements formeront un discours, plusieurs discours un exposé, etc. Lors­qu’il s’agit de discourir sur la réalité extérieure accessible aux sens, la véracité de la succession logique des raisonnements doit être confirmée à chacune des étapes. Et lorsqu’une vérification expérimentale confirme le discours, il peut emporter l’adhésion de l’intelligence. D’une telle démar­che, en bout de ligne, résulte l’ordre des connaissances scientifiques.

Mais la rationalité n’est pas que concernée par l’extérieur et la maté­rialité du monde. Elle est en directe dépendance de la conscience de la vie qui émerge de l’intériorité. Elle ne relève pas du fait que mes sens m’ont informé sur l’existence de réalités à l’extérieur de moi. Elle tient de ce que j’éprouve personnellement l’existence, elle dépend du constat que je suis vivant. La prise de conscience d’être ne peut se produire qu’à l’intérieur de moi et c’est grâce à elle que je puis accéder à la rationalité. Ce n’est en effet que lorsque je deviens conscient d’être, lorsque je prends acte de moi comme entité séparée de tout ce qui existe dans le monde que je peux transcender les images que me renvoient les sens. Je dois en quel­que sorte m’abstraire du monde extérieur pour apprendre que j’existe. Cette abstraction creuse une distance radicale entre moi et les réalités. Ce qui me permet d’accéder aux diverses notions rationnelles. La raison dépend de cette séparation, de cette abstraction pour concevoir le monde objectif.

— L’exercice de la rationalité serait-il nécessairement et toujours pré­cédé par une prise de conscience de soi ?

— Cette prise de conscience est implicite à l’activité rationnelle. Elle la fonde. La rationalité se développe en lien avec la croissance psychologi­que. Elle s’enracine dans le moi. Dans tout discours rationnel, il y a inévi­tablement un moi caché. Ce ne sont plus les sens ou l’instinct qui détermi­nent le comportement et, conséquemment, la démarche discursive. Mais l’acquisition de la liberté, qui est indissociablement liée au développement du moi, permet de choisir telle option plutôt que telle autre. Or, dans la foulée du réel, l’exercice de la liberté comprend deux volets.

Liberté extérieure, d’une part, relative aux alternatives sur lesquelles s’ouvrent les sens. Dans le monde de la matière, les options sont à la fois multiples en quantité mais limitées sur le plan qualitatif. Nombreuses parce qu’elles offrent une multitude d’objets pouvant être choisis. Limitées en ce sens qu’elles proposent des objets qui se réduisent nécessairement à la matérialité. Pour faire ses choix à ce niveau, le moi peut délibérer rationnel­lement. Il peut éclairer les options qui s’offrent à la lumière des connaissan­ces acquises antérieurement ou en puisant dans les ressources de sa culture.

Liberté intérieure, d’autre part, conditionnée par la substance vivante dans laquelle s’enracine la conscience d’être. Elle implique que le moi peut agir en cohérence ou non avec la substance vivante elle-même. Le moi peut en effet inscrire son activité dans la ligne de prolongation de la courbe ascendante de la vie à la conquête des hauteurs. Ou au contraire, il peut refuser de s’engager dans la voie du dépassement qu’implique l’axe ver­tical de croissance pour se rejeter sur l’extérieur où il peut être entraîné par l’entropie vers des niveaux inférieurs d’intensité vitale.

— Cette liberté intérieure s’ouvrirait donc sur une perspective morale ?

— Nous avons ici en effet tout ce qu’il faut pour articuler une morale de la vie. L’éthique est toutefois un discours corollaire trop vaste pour que nous puissions l’élaborer en profondeur à l’intérieur de notre présente démarche. Nous devrons nous contenter d’effleurer le sujet.

Notons d’emblée que le moyen dont le moi dispose pour faire les choix relatifs à l’intériorité, c’est l’affectivité, le cœur ou, mieux, ce que nous appellerons l’intuition de la vie. La conscience de soi est une connaissance expérientielle incommunicable, une connaissance subjective. C’est pour­quoi le mode intuitif convient mieux pour appréhender l’intangibilité de la vie que la logique rationnelle ordonnée à la tangibilité de la matière.

Ainsi, la connaissance intuitive est à la vie ce que la connaissance ob­jective est à la matière. Mais la première n’en n’est pas moins importante. Il s’agit d’une véritable connaissance. Elle ne concerne rien de moins que la moitié du réel. On ne peut la mettre de côté sans s’aliéner du volet intérieur de la réalité. Cette connaissance est d’autant plus fondamentale que l’émergence du moi sur le palier de la conscience réfléchie donne accès à la liberté morale.

— Vous dites que l’intuition est à la vie ce que la raison est à la matière. Ce cloisonnement ne serait-il pas trop marqué ? Il me semble que la raison peut discourir sur la vie et, à l’inverse, que la connaissance du monde sensible peut parfois dépendre de l’intuition.

— Dans la pratique, bien sûr, les humains exercent la rationalité sans faire cette distinction. Vous avez raison de souligner que son usage spon­tané n’est pas aussi radicalement orienté que ce que mon aphorisme laisse entendre. De plus, lorsque l’intelligence scrute le volet vie de la réalité, elle peut élaborer des discours qui ne sont pas exclusivement fondés sur l’intuition. Elle peut s’abstraire du monde sensible pour susciter des scien­ces comme l’éthique, la psychologie, la métaphysique, etc. Ce qui semble, à première vue, aller à l’encontre du principe énoncé plus haut.

Mais ici, nous cherchons à identifier ce qui est visé de part et d’autre par la démarche intellectuelle propre à l’être humain. Le produit de la logi­que rationnelle, c’est la connaissance, n’est-ce pas ? Et lorsque cette logique est exercée sciemment pour scruter la réalité extérieure, les connaissances qu’elle obtient peuvent être dites objectives.

Les éléments fondamentaux d’un discours que je voudrais élaborer sur la pensée d’Aristote, par exemple, ne peuvent provenir en définitive que de l’extérieur. C’est-à-dire de cette zone de réalité où je me confronte, en tant qu’organisme vivant du troisième niveau, à la matérialité du monde. Je ne peux en effet présenter une thèse sur ce philosophe que si j’ai étudié ses écrits, acquis des connaissances sur sa philosophie en consultant des ouvrages. J’ai pu analyser ses œuvres grâce à une formation intellectuelle acquise dans des écoles, dans mes relations familiales, dans mon milieu de vie, etc.

Les livres, les écoles, les divers apprentissages font partie de la matéria­lité du monde humain en ce qu’ils proviennent de l’extérieur et passent par le médium de mes sens pour s’intégrer à ma personne. Pour élaborer mon discours, j’ai dû m’assimiler ces éléments extérieurs. La faculté rationnelle doit se constituer de connaissances objectives pour produire un discours logique tout comme le corps a besoin de s’alimenter de légumes et de viandes pour se maintenir vivant.

Par ailleurs, si je veux exprimer de l’affection, je m’appuierai sur la dimension intérieure de mon être. Peut-être que ce sentiment a été provo­qué par une autre personne mais l’émotion que je ressens ne m’est pas extérieure. Elle prend sa source dans mon intériorité. Je peux certes exté­rioriser mon amour par un geste, une parole chaleureuse, un regard tendre. Mais l’expérience intime d’aimer demeure une réalité qui m’appartient exclusivement. Ses racines plongent dans les couches profondes, et parfois inconscientes, de ma personnalité.

— Je veux bien ! Mais est-il légitime de mettre ce sentiment en parallèle avec la connaissance objective ? Les animaux peuvent éprouver de l’affection même s’ils n’atteignent pas le niveau de la rationalité.

— Le sentiment ne relève pas d’une connaissance objective mais d’une expérience subjective. Quel que soit le statut que l’on voudra lui accorder, l’on doit en tenir compte dans son appréhension du réel si l’on veut être conséquent avec les paramètres de la philosophie quantique. L’animal est conditionné par l’instinct dans ses émotions. L’homme, lui, l’est par l’in­tuition. Entre l’homme et l’animal, la différence tient surtout du fait de la liberté. L’homme peut analyser, délibérer, choisir ou rejeter les impulsions de son affectivité. L’animal, lui, ne peut réfréner son instinct. Le libre arbi­tre caractérise la connaissance intuitive. Cette liberté résulte de l’éclate­ment de l’instinct. Elle hausse le comportement humain au même niveau rationnel que celui exercé pour la connaissance objective.

— L’intuition serait donc une facette de l’intelligence du réel ?

— Dans l’acte de connaître, l’intuition rend compte du fait que les rai­sonnements ne sont pas les produits de cerveaux désincarnés. Ils tirent leurs racines de personnes capables de s’interroger sur elles-mêmes, capa­bles de se poser de pertinentes questions sur l’existence. Vous compren­drez, cher Albert, que nous nous situons ici au niveau des fondements. Nous scrutons le réel pour en comprendre le sens. Ce que nous devons nous efforcer de saisir sur le vif, ce n’est pas tant la rationalité ou l’intuition que la substance vivante elle-même.

Voici que nous sommes parvenus à l’étage de la conscience réflé­chie de la Maison de la vie. Nous voulons savoir comment la substance vivante se comporte à ce niveau et par quel aiguillage elle poursuit sa route évolutive. Antérieurement, soit lors de l’analyse des niveaux inférieurs des multicellulaires et des unicellulaires, nous avons identifié deux grandes lois de l’évolution. Dans un premier temps, la substance vivante développe des formes qui doivent survivre et proliférer dans les diverses conditions de l’environnement terrestre. C’est la loi d’adaptation à la matière. Cette matière à laquelle les organismes se confrontent se situe nécessairement dans l’axe d’horizontalité et d’extériorité. Dans un deuxième temps, la substance vivante propulse les organismes sur une voie de progrès qua­litatifs. C’est la loi de dépassement. Elle incite les organismes à se tendre vers la source originelle afin de capter une énergie qualitativement plus élevée et ainsi inscrire le développement plus haut sur la courbe ascen­dante. Nous sommes ici dans l’axe de verticalité et d’intériorité.

Or, ces deux lois se traduisent, au niveau de la conscience réfléchie, par la rationalité pour répondre à la loi d’adaptation à la matière terrestre, et à l’intuition de la vie pour rendre compte de la loi du dépassement qualitatif.

— En d’autres mots, l’homme disposerait de la rationalité pour s’a­dapter et de l’intuition pour se dépasser ?

— Voilà ! Pour le montrer, examinons ce que les deux lois évolutives produisent en l’humanité. D’abord la loi d’adaptation.

Pour s’adapter aux conditions environnementales terrestres — donc l’axe horizontal — l’homme produit les outils nécessaires à sa survie et à sa croissance en exerçant la rationalité. Les outils prolongent le corps. Ils procurent une extension aux membres. Ils s’interposent entre le corps et le monde extérieur pour le protéger des conditions adverses en détournant la matière de sa trajectoire initiale afin de harnacher ses forces. Par exemple, pour se prémunir contre la chaleur ou le froid excessifs et ajuster son corps aux divers climats, l’homme a inventé tout un outillage d’adaptation, depuis les vêtements faits de peaux de bêtes jusqu’aux appareils de chauffage et de climatisation des habitations modernes.

Mais il y a plus. Il faut comprendre que les outils créés par l’homme ne se limitent pas aux extensions physiques. Ils englobent les institutions de toutes sortes qui règlent la vie en société. La survie de l’organisme humain est en effet en corrélation étroite avec la dimension sociale de l’espèce. L’homme a absolument besoin d’être accompagné par d’autres humains pour survivre et se développer normalement. Les structures d’ordre politi­que et sociétaire qui déterminent la convivialité humaine peuvent donc être considérées comme des outils d’adaptation à la matérialité du monde ter­restre. Et encore, les moyens de communication, la langue, les traditions. En bref, tous les éléments de culture font partie du bagage d’outils indis­pensables à l’adaptation des individus. Si bien que les adaptations réussies des générations antérieures n’ont plus besoin d’être génétiquement codifiées. Elles sont consignées dans les bibliothèques et les institutions de haut savoir. Elles sont communiquées d’une génération à l’autre par l’apprentissage de la culture.

L’ajustement de l’organisme humain aux conditions terrestres dépend donc de l’acquisition du bagage de connaissances que l’on appelle la cul­ture. Pour maintenir l’union des deux substances dans son organisme, l’être humain se doit d’assimiler une culture et participer à une collectivité dont les visées profondes et ultimes sont d’apprivoiser la matière pour créer un milieu favorable au développement des individus et de l’humanité dans son ensemble. De plus, il se doit de chercher à saisir en profondeur les lois qui ordonnent les réalités objectives afin d’en tirer des connaissances utiles. Le sommet de cette démarche, l’aboutissement de cet effort, c’est le développement rationnel. Il culmine dans la connaissance scientifique dont les applications technologiques ont produit la zone d’adaptation pro­pre à l’humanité moderne.

Il découle de ces constats que la loi d’adaptation ne s’adresse pas prio­ritairement aux organismes individuels. Elle passe par le biais communau­taire pour ajuster l’organisme non plus simplement aux divers environne­ments terrestres mais aussi, aux conditions nouvelles créées par la mondia­lisation même du genre humain.

— Le caractère collectif de l’adaptation de l’humanité me semble ef­fectivement une évidence. Mais qu’en est-il pour l’autre volet ?

— Si la loi d’adaptation à la matière concerne principalement la société, la loi du dépassement, elle, s’adresse prioritairement à l’individu sans pour­tant exclure complètement la dimension communautaire. Elle interpelle le moi intérieur pour l’amener à une prise de conscience de l’être au pré­sent, ce qui lui ouvre un espace de liberté. JE SUIS ! JE SUIS VIVANT ! Je suis capable de penser et d’agir en conséquence ! Donc, JE SUIS LIBRE !

En bout d’analyse, cette liberté intérieure consiste implicitement à ac­cepter ou à refuser la vie en ses exigences de dépassement. C’est-à-dire que dans l’ultime, elle aboutit soit à inscrire le développement individuel dans la ligne générale de prolongement de la poussée vitale, soit à refuser les exigences liées à la dimension de l’intériorité pour rejeter la conscience sur la matérialité extérieure. Toute la liberté morale de l’homme tient dans ce choix entre le oui ou le non au fluide vital qui réclame le dépassement qualitatif.

Le produit propre à cet axe vertical de croissance et de développement ne se réduit toutefois pas à la morale. Il inclut tout le domaine de la pensée philosophique, de la création esthétique, des œuvres humanitaires et culmine dans l’expérience mystique ainsi que dans l’incontournable et multiforme démarche religieuse de l’humanité.

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Tous les animaux craignent et fuient le feu. L’être humain de la préhistoire a su s’en approcher et le maitriser. Ce qui démontre l’intervention de la rationalité. Le feu a sans doute été l’une des toutes premières découvertes “scientifiques” de l’humanité.
Les outils que les humains fabriquent depuis la préhistoire, incluant le vêtement et l’habitation, peuvent être considérés comme des extensions physiques du corps, indispensables à la survie de l’espèce humaine.
Dès l’origine, la survie des humains a été et est encore en corrélation étroite avec la dimension sociale de l’espèce. L’homme a eu et a encore absolument besoin d’être accompagné par d’autres humains pour survivre et se développer normalement.
Les structures architecturales et les institutions d’ordre économique, politi­que et sociétaire, qui déterminent la convivialité humaine, peuvent être considérées comme des outils d’adaptation à la matérialité du monde ter­restre. Et encore, les moyens de communication, la langue, les traditions, en bref, tous les éléments culturels font partie du bagage d’outils indispensables à l’adaptation horizontale du genre humain.
La rationalité n’est pas que concernée par la maté­rialité du monde. Elle est en directe dépendance de la conscience de la vie qui émerge de l’intériorité. Elle tient de ce que j’éprouve personnellement l’existence. Elle dépend du constat que JE SUIS VIVANT qui initie à la dimension verticale de l’être.

2 réponses à “17- L’ère de la liberté”

  1. COMMENTAIRE 1

    « Albert : Instinct, rationalité, moi humain… Ce sont là des termes que vous utilisez sans suffisamment justifier à mes yeux leur apparition dans votre exposé. »
    Je partage entièrement ce commentaire d’Albert. Mais, pour ma part, j’ai résolu cette question. Au fil des entretiens, j’ai compris que l’écrit de notre ami Paul n’est pas une thèse de doctorat. C’est un essai. Il partage donc, très librement, des commentaires très personnelles. En tant que lecteur, je n’ai pas à lui demander de rendre des comptes. Je lis et je prends, dans les intuitions merveilleuses que partage Paul, ce qui peut alimenter ma propre réflexion. C’est aussi le but du « Groupe de Travail Pensée Nouvelle »
    À la page 208, mon beau-frère Gervais a laissé son commentaire : « Amusant que l’on parle de « profondeur » chez les personnes qui cherchent une croissance sur l’axe de la vie de la la course ascendante. L’art est une manifestation que l’homme pose se sa connaissance ‘intuititve’. »
    Descendre pour monter, fascinant en effet.
    Ici, notre ami revient de manière intense à sa grande intuition : la réalité a deux faces. Il les appelle souvent « matière et vie », mais parfois aussi « intériorité et extériorité » ou encore « objectivité et subjectivité ». Ici en tout cas, je suis très heureux de le voir poser que la « vérité » doit inclure à la fois ce qui vient par les sens et que la rationalité analyse, et ce qui vient par l’intuition et que la rationalité cherche aussi à recevoir et à analyser. Si, dans le premier cas, on peut parler « d’abstraction », dans le second, on pourrait voir le mouvement contraire, celui de la « concrétisation » ou encore de « l’incarnation ». L’homme cherche à mettre en mot, puis en action les intuitions qui le lient à un monde très intérieur et qui, possiblement, le relient à Dieu même.

  2. Quelque points forts de cet entretien :
    1- La démarche évolutive privilégie la mobilité animale plutôt que la stabilité végétale.
    2- La conséquence : essor de la conscience et élargissement de l’intériorité.
    3- La conscience produit le comportement
    4- Double déterminisme du comportement : instinct intérieur et conscience extérieure.
    5- Au niveau humain, le MOI prend la place de l’instinct et la rationalité se substitue aux sens.
    6- La rationalité saisit des réalités inaccessibles aux perceptions sensorielles.
    7- La rationalité donne accès à la liberté du comportement.
    8- La liberté est double : à l’extérieur elle permet de faire des choix qui se réduisent à la matérialité ; à l’intérieur elle permet de faire des choix en regard de l’intuition de la vie.
    9- Au niveau de la conscience réfléchie, les deux lois de l’évolution se traduisent par la rationalité pour répondre à la loi d’adaptation à la matière terrestre, et à l’intuition de la vie pour rendre compte de la loi du dépassement qualitatif.
    10- La loi d’adaptation ne se limite pas aux extensions physiques du corps humain mais englobe les institutions de toutes sortes qui règlent la vie en société : les ordres politique, sociétaire, cuturel, scientifique, etc.
    11- La loi du dépassement interpelle le MOI intérieur pour l’amener à accepter ou à refuser la vie en ses exigences de dépassement. Elle produit la pensée philosophique, la création esthétique, les œuvres humanitaires, la multiforme démarche mystico-religieuse de l’humanité, etc.

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