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Christian : Votre présentation de la pensée du Magistère de l’Église est convaincante. Il me resterait à saisir la complémentarité de la foi et de la science en regard de la Genèse.
– Pour accéder au sens véritable des récits de la création, on doit décortiquer les images que les auteurs ont utilisées pour accéder à ce qui leur a été inspiré par l’Esprit. Un peu comme l’archéologue dont les fouilles révèlent les coutumes et la culture d’une civilisation antique. Dans cet esprit, relisons les tout premiers versets de la Bible.
Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre. Or, la terre était vide et vague, les ténèbres couvraient l’abîme…
« Au commencement… » Face aux affirmations de l’Orient, qui propageait l’idée d’un univers cyclique enfermé dans “l’éternel retour”, la Genèse affirme qu’il y a un début. C’est déjà toute une proposition. Car au concept de commencement se rattache l’idée d’aboutissement, de finalité. Et de fait, le premier mot de la Genèse, « au commencement », appelle le dernier mot de l’Apocalypse : « Amen ! » (Ap 22, 21). Cette expression conclusive fait pressentir une issue heureuse à l’aventure universelle, un épanouissement de la création !
Entre ces deux extrémités surgissent l’espace et le temps. L’affirmation d’un commencement et d’une fin implique le déploiement de la réalité sous la forme d’un développement, d’une croissance, d’une histoire ! Nous nageons ici en plein cœur de la révélation judéo-chrétienne introduisant la notion d’un univers en mouvement vers un accomplissement, d’une humanité en devenir selon un plan bien précis du Créateur. Des concepts qui s’harmonisent parfaitement avec l’hypothèse de l’évolution.
En Occident, d’autre part, l’idée d’un « commencement » entrait en conflit avec la cosmogonie qui avait cours depuis l’antiquité grecque. Jusqu’au début du 20e siècle, en effet, la plupart des érudits – philosophes, mathématiciens, astronomes, physiciens (Einstein inclus) – présupposaient que la matière était éternelle. Ils croyaient que le cosmos avait toujours existé, qu’il n’avait ni commencement ni fin.
En 1927, le chanoine Georges Lemaître lançait, comme un pavé dans la mare de ces présuppositions, le modèle cosmologique d’un univers en expansion. Il conjecturait que le parcours des astres dans l’espace et le temps remontait à la dilatation d’un “atome primitif”.
Cette hypothèse n’est pas du tout bien accueillie dans le milieu scientifique. On accuse le prêtre catholique de prétendre accréditer le récit biblique de la création. Mais en 1929, deux ans après la publication de sa théorie, l’astronome Edwin Hubble démontrait expérimentalement que les galaxies s’éloignent les unes des autres. C’est la preuve d’une expansion constante de l’univers dans l’espace et le temps qui remonte à l’éclatement de l’atome théorique de Lemaître.
« …Dieu créa le ciel et la terre… » Les civilisations antiques ont imaginé des empyrées peuplés par de nombreux dieux, dont les actions causaient le monde et conditionnaient la réalité humaine. À l’encontre de cette vision des choses, l’auteur de la Genèse affirme l’existence d’un seul Dieu, cause de tout ce qui existe, soit les réalités visibles (la terre) et invisibles (le ciel). Certains philosophes grecs sont parvenus à la conception d’une Cause première de l’univers, mais cette notion rationnelle était abstraite. Ce qui a peu à voir avec le Dieu vivant de la Bible en relation avec sa création, avec l’homme en particulier.
« …Or la terre était vague et vide… » L’auteur emploie des images minimales pour évoquer un avant la création. Le « vague » symbolise l’indéterminé, le « vide » signifie l’absence de contenu. Les trois premiers jours, le Créateur détermine les lois qui vont à l’encontre du « vague » en précisant les choses. Le premier jour, il effectue une distinction entre la lumière et les ténèbres ; le deuxième jour, entre les eaux inférieures et les eaux supérieures ; le troisième jour, entre la terre ferme et l’océan.
Les trois jours qui suivent permettront de combler le « vide » initial par des êtres dans les espaces créés les trois premiers jours. Au quatrième jour, c’est la création des astres du jour et de la nuit, qui répond à la distinction entre la lumière et les ténèbres du premier jour. Le cinquième jour, la création des oiseaux et des poissons fait suite à la séparation du deuxième jour entre les eaux du ciel et celles de la terre. La création du sixième jour permettra de remplir d’organismes vivants (les animaux et les hommes) le continent qui a émergé des eaux le troisième jour.
On le constate, les trois derniers jours de la création sont à lire en parallèle aux trois premiers. Donc, voici un procédé littéraire qui tient plus de la forme poétique et philosophique que de l’exposé linéairement logique (voir l’illustration).

Christian : Mais pourquoi l’auteur utilise-t-il ce procédé ? Que veut-il communiquer ?
– Le fait que le scribe expose sa pensée dans un format particulier et en élaborant une structure qui n’est pas d’emblée évidente est en soi significatif. Il n’aurait pas pu dire plus clairement que son discours ne doit pas être interprété à la lettre.
Car son exposé ne vise pas tant à décrire des actes successifs du Créateur dans le temps qu’à évoquer l’ordre dont il a imprégné sa création. En laissant percevoir une structure sous-jacente à son discours, il indique qu’il ne faut pas porter son attention sur les descriptions détaillées des six jours mais plutôt considérer l’ensemble de manière synthétique et ainsi épouser le regard hors du temps du Créateur.
Au-delà des images utilisées pour évoquer des actes créateurs successifs, on peut donc saisir la pensée de l’auteur, à savoir que le Seigneur est à l’origine de toute la réalité ! Globalement !
– La structure parallèle des six jours de la création ne permettrait-elle pas d’expliquer les incohérences déjà relevées du premier récit ? De sorte que s’il faut renoncer à interpréter ce texte selon la séquence temporelle qu’il décrit, du moins pourrions-nous y percevoir une logique qui justifierait autrement la lettre de l’Écriture…
– Ami très cher, je vois que vous tenez à tout prix à sauver le sens littéral. Il semble que vous l’assimiliez à la notion d’inerrance (sans erreur) de l’Écriture, de sorte que la contestation de la lettre vous apparaît comme une attaque à sa vérité.
Mais si l’Église enseigne que les textes sacrés sont exempts d’erreurs en ce qu’ils exposent les vérités de la foi, elle reconnaît qu’ils peuvent être et sont effectivement faillibles lorsqu’ils touchent aux conceptions humaines. Je vous concède, cependant, qu’il n’est pas toujours facile de discerner entre la révélation divine et les concepts humains. C’est pourquoi un solide travail de recherche s’impose pour se disposer à accueillir authentiquement la Parole de Dieu en la dégainant de son enveloppe anthropomorphique.
Le constat de la structure parallèle des six jours de la création me fait quant à moi tirer une conclusion contraire à celle que vous souhaiteriez. À savoir que les images utilisées par l’auteur pour exprimer son intuition sont tout à fait accessoires. Je pense, en définitive, que s’il a décrit la création de la végétation avant celle du soleil, ce n’est pas parce qu’il ignorait que les plantes ont besoin de l’astre du jour pour vivre mais parce qu’il ne se souciait pas d’être cohérent à cet égard, tout occupé qu’il était à traduire son inspiration sous une forme schématique.
On ne doit donc pas s’arrêter aux images qu’il utilise pour exposer son intuition. On doit plutôt dégager la structure de pensée qu’il laisse transparaître sous ces images.
– Que peut-il bien vouloir nous dire par la création des végétaux le troisième jour, par exemple ?
– Référons-nous au schéma. Le troisième jour prépare le milieu dans lequel seront créés les êtres du sixième jour, soit les animaux et les humains. Le troisième jour, donc, Dieu prévoit d’assurer la nourriture essentielle au maintien et à la croissance de leur vie. La végétation, c’est la nourriture qu’il leur attribue explicitement, comme l’indique l’auteur inspiré à la fin de son récit.
Si nous devions prendre ces versets à la lettre, il nous faudrait comprendre que toutes les espèces animales, incluant l’espèce humaine, ont été créées végétariennes. Ce ne serait qu’après le déluge, selon la Genèse, que Dieu aurait permis à Noé de manger de la chair, en plus de la végétation.
Soyez la crainte et l’effroi de tous les animaux de la terre et de tous les oiseaux du ciel, comme de tout ce dont la terre fourmille et de tous les poissons de la mer : ils sont livrés entre vos mains. Tout ce qui se meut et possède la vie vous servira de nourriture, je vous donne tout cela au même titre que la verdure des plantes (Gn 9, 1-3).
Mais si les humains et les animaux étaient végétariens avant le déluge, à quoi auraient bien pu servir les armes et outils biologiques des carnivores puisqu’à l’origine, ils n’en auraient pas eu besoin pour se nourrir ? Un lion ne serait pas un lion s’il ne disposait pas de crocs et de griffes pour déchirer sa proie. Dieu aurait-il attribué des serres et un bec puissant à l’aigle pour saisir et déchiqueter sa prise s’il avait dû se nourrir exclusivement d’herbe et de fruits ? Les organes sont formés en fonction de la nourriture dont les espèces ont besoin pour se maintenir vivantes. Végétariens et carnivores jouissent d’organes différents adaptés à leur nourriture et au milieu dans lequel ils évoluent.
De plus, les connaissances positives confirment que les organismes vivants se repaissent copieusement les uns des autres depuis le tout début microscopique de la vie sur notre planète. L’auteur de la Genèse n’a donc pu vouloir dire que les espèces ont été créées végétariennes à l’origine et seraient devenues carnivores par la suite, en conséquence du péché d’Adam et Ève par exemple, ou encore, à la suite d’un ordre nouveau imposé à la création après le déluge.
Les passages cités laissent plutôt transparaître une préoccupation théologique, et non biologique, de l’auteur. Il répond à une objection à propos du mal dans la création. L’auteur est conscient que ce mal pourrait être jugé consécutif à la souffrance et à la violence qui existent dans la création même avant l’arrivée de l’homme. Les animaux qui s’entre-dévorent pour survivre connaissent la souffrance. La biche qui tombe sous les pattes du prédateur souffre et subit l’injustice de se voir ravir la vie. Au nom de leur survie, les animaux doivent payer un tribut à la férocité. Ils doivent se développer selon une économie terrestre où le puissant l’emporte implacablement en usant de moyens que l’on peut juger cruels et sans pitié, vus de notre perspective.
Les évidences inclineraient donc à induire que la racine du mal moral dans l’humanité découle de cette violence inévitable chez les espèces inférieures de la création. Ne pourrait-on pas blâmer le Créateur d’avoir créé un tel monde et le tenir responsable de la souffrance, de l’injustice et de la mort ? L’auteur répond à cette objection en faisant entendre que Dieu a créé un monde sans mal et sans souffrance, un monde idéal qui se nourrit de végétation et n’a donc pas besoin de recourir à la violence pour se maintenir.
Ce végétarisme relevant d’une intention divine est en fait un signe – et non une réalité effective – du projet de Dieu de créer un monde harmonieux et pacifié. Un signe qui révèle non le début mais l’aboutissement d’un acte créateur qui transcende l’espace et le temps. Le prophète Isaïe a pressenti cet accomplissement à venir et le décrit en des termes poétiques qui rejoignent l’intuition du scribe inspiré de la Genèse.
Le loup habitera avec l’agneau,
la panthère se couchera avec le chevreau.
Le veau, le lionceau et la bête grasse iront ensemble,
conduits par un petit garçon.
La vache et l’ourse paîtront,
ensemble se coucheront leurs petits.
Le lion comme le bœuf mangera de la paille.
Le nourrisson jouera sur le repaire de l’aspic,
sur le trou de la vipère le jeune enfant mettra la main.
On ne fera plus de mal ni de violence sur toute ma montagne sainte,
car le pays sera rempli de la connaissance de Yahvé,
comme les eaux couvrent le fond de la mer (Is 11, 5-9).
Derrière les concepts utilisés par Isaïe et par l’auteur de la Genèse, l’on peut donc apercevoir une signification théologique considérablement plus profonde que le sens littéral permet de supposer. Ce qui oblige à exclure d’emblée une interprétation littérale, même selon la cohérence logique que vous suggériez, il y a un instant.
La séparation des eaux, le deuxième jour fait également ressortir le côté arbitraire des signes utilisés. Selon la culture du temps, l’élément aquatique était divisé en deux catégories : les eaux inférieures, qui comprenaient les mers, les lacs, les sources, les rivières, et les eaux supérieures, situées au-dessus de la voûte céleste. L’auteur croyait, dans la foulée des représentations traditionnelles, que la pluie s’expliquait par l’existence d’une nappe d’eau au-dessus des nuages. D’où la nécessité pour le Créateur, alors que les éléments étaient encore confondus, de séparer « les eaux d’avec les eaux… les eaux qui sont sous le firmament d’avec les eaux qui sont au-dessus du firmament » (Gn 1, 6-7).
Nous savons aujourd’hui qu’il n’y a pas de nappe d’eau « au-dessus du firmament » et que la pluie s’explique par l’évaporation des eaux terrestres. Par conséquent, le Créateur n’a jamais eu à séparer « les eaux d’avec les eaux ». Il n’a pas eu non plus à séparer la lumière des ténèbres avant la création des astres ni à faire émerger le continent de l’océan. Ces images, issues d’une culture antique, demeurent toutefois valables en tant qu’éléments accessoires du schéma qui illustre la véritable pensée de l’auteur.
– Mais comment exprimerions-nous aujourd’hui sa vision ?
– Nous avons dit que le Créateur, selon l’auteur inspiré, occupe les trois premiers jours de la création à imposer un ordre au « vague » originel, à séparer les éléments pour que puisse apparaître l’espace dans lequel pourront exister les réalités tangibles dans le temps. Ce cadre, nous dirions aujourd’hui que c’est la matière dans laquelle sont en quelque sorte découpés tant les êtres vivants que les objets inanimés. Par le récit des trois premiers jours, l’écrivain sacré veut donc signifier que le Créateur a fixé dès l’origine les lois immuables du tissu de base de la réalité concrète. La matière a été voulue par le Créateur en tant que déterminisme de l’espace et du temps.
Les astrophysiciens actuels parlent de quatre forces fondamentales qui conditionnent la substance matérielle. Si l’on voulait réécrire en termes modernes ces versets de la Bible, l’on pourrait utiliser ces connaissances. Mais ces concepts pourraient un jour être contestés. Ils pourraient être remplacés par d’autres jugés plus adéquats pour exprimer ponctuellement les lois fondamentales de la substance que nous nommons matière, tout comme les notions de l’auteur de la Genèse ont été dépassées par les connaissances modernes.
Les jours qui suivent les trois premiers sont occupés à remplir le « vide » initial par des êtres. Et si l’on s’efforce de comprendre ce que le scribe veut dire, l’on traduira que le Créateur a enclenché la réalité en attribuant à la matière la possibilité d’être manifestée dans des formes.
– Comment pouvez-vous arriver à une telle déduction ?
– Si les trois premiers jours sont consacrés à la création de la matière, il serait logique, à première vue, d’attendre la création des êtres vivants les trois jours suivants. De fait, les deux derniers jours de cette triade voient l’émergence des oiseaux et des poissons le cinquième jour, des animaux et des humains le sixième. Mais le quatrième jour, ce sont les astres du jour et de la nuit qui sont formés tandis que les végétaux – pourtant des vivants – sont « produits » par la « terre » (Gn 1, 12) le troisième jour.
– Que vient donc faire cette asymétrie dans la structure si cohérente que nous avons observée jusqu’ici ?
– Elle contraint à scruter plus profondément le texte pour nous situer au niveau de l’activité créatrice, alors que « les ténèbres couvrent l’abîme » et qu’un « vent de Dieu tournoie sur les eaux » (Gn 1, 2). L’activité créatrice ne se situe pas directement au niveau des accidents au sens philosophique du terme. Elle ne s’insinue pas dans la trame des causes secondes ou efficientes qui tissent la réalité telle que nous la percevons. Elle se manifeste par la proclamation de principes universels, de lois fondamentales. Ce que le « Dieu dit » répété neuf fois dans le récit suggère clairement.
Agir au niveau des accidents ne serait pas digne du Créateur car ce que nous percevons de la réalité démontrerait des limites à la toute-puissance divine. Les insuffisances et les ratés observés dans la création – et à un titre éminent la souffrance et la mort – pourraient lui être imputés comme une conséquence de l’imperfection de l’Acte créateur.
Cet acte créateur ne s’effectue pas dans l’extériorité. Dieu ne crée pas à partir d’une autre galaxie ou d’un ailleurs objectif de l’univers. Par l’asymétrie de sa présentation schématique, l’auteur inspiré incite à dépasser la dualité qui se manifeste dans le monde des apparences pour plonger en profondeur aux racines de la réalité où nous trouvons le mystère unitaire de l’être. Dieu donne l’être des choses. Il les fait être de l’intérieur en leur procurant la possibilité d’épouser une forme qui leur est propre.
Par elle-même, la matière pure ne pourrait être autre chose qu’un amas indistinct à la frontière de la réalité ; une soupe chaotique d’énergie, un bouillon sans axe de développement, sans orientation, sans trajectoire. Rien de particulier n’aurait pu en émerger si le Créateur n’avait pas créé la potentialité des formes. Cette capacité fait que, pour exister, les êtres imposent à la matière une structure, une forme qui retient dans l’unité la multiplicité des éléments qui les constituent. Matière et forme sont reliées et ne pourraient exister l’une sans l’autre dans la réalité. La matière pure ne pourrait apparaître s’il n’existait aucune forme structurante pour la manifester. Le Soleil ne pourrait pas se maintenir s’il ne bénéficiait pas de la potentialité formelle qui le fait être Soleil. Il ne pourrait ni éclairer ni diffuser sa chaleur si son existence ne faisait pas la cohésion des particules dont il est constitué pour les empêcher de se disperser indistinctement dans tout l’univers.
Il en est de même pour tout ce qui se rencontre dans le monde objectif, tant les êtres inanimés que les êtres animés. Ils doivent tous leur existence à la capacité d’épouser une forme, à cette potentialité structurale que la matière originelle ne détient pas d’elle-même mais reçoit du Créateur pour émerger de l’univers intérieur de l’être.
– En ramenant les six jours de la création à deux notions, matière et forme, ne craignez-vous pas d’accommoder les textes sacrés à vos idées préconçues ? Ne leur faites-vous pas dire ce que vous voulez bien qu’ils disent ?
– N’est-ce pas en un sens ce que nous faisons lorsque nous lisons la Bible dans un esprit religieux ? Nous accommodons un texte en le méditant pour en être interpellés dans notre vie spirituelle. Ce qui ne veut pas dire que notre interprétation soit purement subjective et ne correspond en rien à la signification objective des textes. Nous cherchons à savoir ce que l’Auteur véritable, Dieu, veut nous dire. Et c’est ici que nous touchons à la richesse inépuisable de la Bible dont la clef d’accès est l’Esprit Saint. En synergie avec notre lecture, il infuse ses lumières, ses inspirations, ses impulsions en proportion de notre réceptivité et de nos besoins.
Lorsque j’accommode les textes sacrés à mes idées préconçues, comme vous dites, je fais la même chose que le croyant qui médite à partir du texte biblique. À cette différence près que je l’interprète dans une perspective philosophique et non strictement spirituelle, pour nourrir la partie rationnelle de mon esprit – ce qui me semble tout à fait légitime.
L’auteur ignorait sans doute les concepts de matière et de forme. Mais l’Esprit divin, lui, n’ignorait sûrement pas les réalités auxquelles ces notions réfèrent. Il a pu y faire allusion en filigrane du récit inspiré – à l’insu même du scribe – pour qu’on les découvre aujourd’hui. La condition d’accès à cette découverte, c’est la méditation sur la structure du récit. Une exploration dont nous n’avons touché que la surface. Il nous faudrait connaître les subtilités de la langue dans laquelle ce texte a été écrit pour l’approfondir. Je pense qu’une telle étude confirmerait mes avancées.
Mais même sans ces outils, nous pouvons aller plus loin encore dans l’interprétation. Aux deux notions précitées, j’associerai les termes d’“externité” et d’“internité”. L’“externité” est à la matière (qui définit le « vague » originel) ce que l’“internité” est à la forme (qui comble le « vide » initial). Deux principes, tout autant indissociables l’un de l’autre que matière et forme, à la racine même de la réalité. C’est l’émergence de cette double dimension qui a fait surgir la réalité de rien.
Avant l’acte créateur, en effet, il n’existe rien. Que Dieu ! Il n’y a pas de “hors de Dieu” car Dieu est en Lui-même dans son éternité. Pour que la création soit possible, il a fallu que le Créateur conçoive une réalité à la fois hors de lui et indépendante de lui. La décision de créer l’univers a donc du coup projeté les principes d’“externité” pour répondre à la nécessité d’une réalité hors de Dieu et d’“internité” pour satisfaire à l’exigence d’une réalité indépendante de lui. L’“externité” rend possible des existences distinctes de Dieu. Tandis que l’“internité” fonde le développement de l’individualité, de l’être en soi, donc d’une création éventuellement ouverte au devenir, à une évolution sous le signe de la liberté.
J’ai inventé ces néologismes plutôt que d’utiliser les concepts d’intériorité et d’extériorité en raison de leur ressemblance euphonique au mot éternité. Il ne faut pas oublier que Dieu est éternel et que lorsqu’un Dieu éternel crée, il crée depuis son éternité et non à l’intérieur de l’espace et du temps.
– Ce que vous dites-là me semble entrer en contradiction avec la Genèse. Par son exposé de la création en sept jours, l’auteur du premier récit n’affirme-t-il pas implicitement que Dieu a créé dans le temps ?
– Les Pères de l’Église se sont demandé à quelle sorte de jours l’auteur de la Genèse faisait allusion puisque le Soleil, qui marque les jours, n’a été créé que le quatrième jour ! Ils en ont déduit que ces jours ne doivent pas être entendus dans le sens littéral. Je citerai deux auteurs à l’appui.
Celui qui a l’intelligence supposera que le premier, le deuxième et le troisième jour ont existé sans le soleil, la lune et les étoiles et que le premier jour, a été en quelque sorte également sans le firmament… Je ne peux supposer que quelqu’un puisse douter que ces choses indiquent figurativement certains mystères, l’histoire [de la création] étant survenue en apparence et non littéralement (Origène, Les doctrines fondamentales 4, 1-16).
Quelle sorte de jours [de la création] c’était, il est extrêmement difficile, et peut-être même impossible pour nous de le concevoir, et d’autant plus de le dire (Augustin, La Cité de Dieu 11, 6). À tout le moins, nous savons qu’il [le jour de la création] est différent du jour ordinaire avec lequel nous sommes familiers (Augustin, L’interprétation littérale de la Genèse 1, 19-20).
Nous faut-il encore une fois prendre l’auteur de la Genèse en défaut et conclure à son ignorance du fait que les jours se comptent par rapport au périple apparent du Soleil ? Certainement, il n’ignorait pas ce que toutes les populations, mêmes les plus primitives, savent. Puisque son utilisation du concept de jour ne peut raisonnablement être attribuée à de l’ignorance, il reste donc à l’expliquer par une intention consciente. L’auteur aurait voulu expressément l’incohérence de compter les jours avant la création du Soleil pour signaler que les jours dont il parle ne réfèrent aucunement à des périodes temporelles. C’est d’ailleurs ainsi que Clément d’Alexandrie, autour de l’an 208, l’a compris.
Et comment la création aurait-elle pu avoir lieu dans le temps, vu que le temps est né de pair avec les choses qui existent ?… L’expression « quand ils furent créés » [cf. Gn 2, 4] implique une production indéfinie et sans date (Clément d’Alexandrie, Miscellanies 6, 16).
L’utilisation du concept du jour est donc accessoire. Il permet seulement au rédacteur de situer la création à l’intérieur d’une semaine. En théorie, il aurait pu utiliser le cadre d’un siècle, d’une année, d’une journée. Mais sans doute que ces entités temporelles ne se seraient pas prêtées aussi facilement à l’expression de la structure de pensée qu’il voulait exposer et dont nous avons déjà parlé.
– Pourquoi une semaine de sept jours ? Serait-ce pour faire allusion à la signification mystique du chiffre sept, symbole de la perfection ?
– Une semaine est un cycle complet de temps. Ce choix pourrait signifier que l’acte créateur englobe tout le temps, depuis le commencement jusqu’à la fin. Les Pères de l’Église ont à tout le moins envisagé cette interprétation. Certains ont associé aux six jours de la création six âges de la Terre de mille ans, arguant que pour Dieu « mille ans sont à tes yeux comme le jour qui passe » (Ps 90, 4). Nous en serions au sixième âge, celui de la création de l’homme, tandis que le septième, celui du repos sabbatique, serait encore à venir.
Ce dernier jour est celui de l’achèvement, de l’accomplissement, de l’épanouissement qui marque l’entrée de la création dans la sphère divine. Le matin du septième jour est sans fin. Ce que l’on peut déduire du fait que le rédacteur de la Genèse ne termine pas le septième jour par la formule utilisée pour les six jours antérieurs : « Il y eut un soir, il y eut un matin ».
– Mais l’auteur ne situe-t-il pas l’acte de création à l’origine du temps ? Conséquemment, la création est actuellement achevée puisque la Bible dit textuellement que Dieu a « conclu au septième jour l’ouvrage qu’il avait fait ».
– Et le verset que vous citez poursuit en disant que Dieu « chôma après tout l’ouvrage qu’il avait fait ». Dans le livre de l’Exode, ce chômage est interprété comme un repos. « Car en six jours, Yahvé a fait le ciel, la terre, la mer et tout ce qu’ils contiennent, mais il s’est reposé le septième jour » (20, 8). Le passage fournit un fondement théologique au sabbat. Repos dont l’homme a besoin non uniquement pour refaire ses forces physiques mais pour favoriser également son essor spirituel.
L’homme, certes, a besoin de repos mais Dieu, lui, en aurait-il besoin ? Voilà une façon bien humaine de parler ! Un anthropomorphisme typique des premiers livres de la Bible. Les auteurs ignoraient encore l’absolue perfection de Dieu et projetaient sur lui des conceptions très humaines.
Comme celui, entre autres, de se représenter un univers statique, un univers figé dès l’origine par des déterminismes immuables, un univers qui ne change pas, qui n’évolue pas. Dans cette optique, l’acte créateur se limite à donner une impulsion initiale à une création apte à se reproduire par la suite d’elle-même sans variantes ni changements. D’où l’image d’un Dieu qui aurait créé l’univers au début du temps et se reposerait depuis !
Mais Dieu aurait-il cessé d’être Créateur ? Cette conception de la création ne colle pas à un univers en évolution, à un monde en mouvement vers une certaine destination. Elle ne convient pas non plus à une juste conception de la Divinité.
Bien qu’il soit à l’origine des réalités que nous, les humains, percevons dans le temps, Dieu n’est pas lui-même dans le temps. Dans son éternité, tout lui est présent, tant ce qui est passé que ce qui est à venir pour nous. Dieu n’a donc pas été Créateur seulement à l’origine, il est maintenant Créateur. Il n’a pas créé l’univers à l’aube de l’espace et du temps, il est, actuellement, dans l’acte de créer l’univers. Non seulement Dieu ne se repose pas mais il est en fait toujours en plein travail de création.
Jésus a exprimé cette vérité surprenante aux Pharisiens qui le critiquaient parce qu’il avait opéré une guérison le jour du sabbat. Il leur a répondu laconiquement, contredisant ainsi l’interprétation littérale du “chômage” de Dieu : « Mon Père est à l’œuvre jusqu’à présent, et j’œuvre moi aussi » (Jn 5, 17).
– Faudrait-il induire de cette réplique que non seulement le Verbe incarné rejetait l’interprétation de la Loi mosaïque par les Pharisiens mais qu’il a été un évolutionniste avant terme ?
– Je vois que vous avez compris les profondes implications de cette parole ! Le fait de concevoir l’acte créateur au présent, plutôt que de le projeter à l’origine du temps, peut considérablement révolutionner notre vision de l’univers. L’actualisation de la création constitue un paradigme auquel le concept de l’évolution s’ajuste tout naturellement. Puisque l’acte de créer est toujours exercé dans la dimension du présent divin, il s’ensuit que cet acte englobe tout le temps, du commencement jusqu’à la fin. Les êtres de toutes les époques existent à l’intérieur même de ce geste créateur. Un même acte qui, de notre perspective, a été amorcé au début de l’univers, s’est poursuivi jusqu’à nous et se prolonge au-delà de nos existences ponctuelles vers un accomplissement, un achèvement à venir.
L’évolution, c’est la vision séquentielle d’un unique acte de création étalé dans l’espace et le temps. Un acte qui n’est pas actuellement achevé et ne peut être pleinement compris que par sa destination finale.
Un exemple permet de comprendre ce qui est en cause. Si je découpe le geste de saisir une pomme en une multitude d’instantanés, chacune des images isolées ne permet pas d’en déduire le mouvement ni d’en extrapoler le but. Seules les dernières images, dans lesquelles on verra apparaître la pomme et la main qui s’apprête à la saisir, en donneront le sens.
Il en est de même pour la création. De notre perspective temporelle, nous ne pouvons considérer qu’un instantané à la fois. On ne pourra saisir la perfection de cette création avant l’approche de son achèvement, de son accomplissement ! Ce geste unique d’un Dieu unique permet d’expliquer la diversité des espèces vivantes. Elles peuvent être considérées comme des moments transitoires de la montée de la vie vers la conscience et la liberté de l’être humain, lui-même en marche vers une mystérieuse destination. Voilà une théorie très féconde pour la pensée, et particulièrement stimulante pour la vie spirituelle.
–Vous parlez de théorie féconde. Je la qualifierais plutôt de projection idyllique, et même quelque peu candide. En ce sens qu’elle ne me semble pas rendre compte du tragique de la condition humaine.
– Vous avez raison de soulever le problème de la souffrance et de la mort. Il ne faudrait toutefois pas présumer qu’il ne puisse être résolu sans déroger à la perspective évolutionniste. Bien au contraire ! Mais voilà un sujet très vaste que nous ne pouvons pas aborder maintenant. Nous y viendrons en compagnie d’Ève dans la troisième partie de notre recherche en référence au deuxième récit de la création (chapitres deux et trois de la Genèse).
En prenant congé de vous, cher Christian, puis-je conclure en vous rappelant que notre démarche ensemble visait au départ à clarifier le concept de création du point de vue du croyant. Dans mes échanges avec Albert, que je vous invite à suivre, nous préciserons celui de l’évolution à partir d’une perspective rationnelle et objective.
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4 réponses à “4- La Genèse revisitée”
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Je ne pourrai pas être avec vous pour la réunion du 8 février. Je serai à Mégantic pour prendre le relais des parents de Rosalie qui vient de subir une intervention au cerveau. Ses parents ne peuvent pas se permettre de perdre une autre semaine de salaire. Nous allons les remplacer pour une semaine, peut être plus?
j’avais un sujet dont je voulais parler, un sujet qui me tient à coeur. C’est sur la genèse, mais nous pourrons en parler à la prochaine réunion si vous le voulez…bien sur!
À bientôt de se voir, Jean Marie -
Voici quelques commentaires :
Le sens subjectif et objectif
Notre auteur commence cet entretien par une phrase qui me met toujours mal à l’aise. Il écrit : « Pour accéder au sens véritable des récits de la création, on doit décortiquer les images que les auteurs ont utilisées pour accéder à ce qui leur a été inspiré par l’Esprit. » Cette phrase laisse sous-entendre qu’il y aurait UN SEUL sens aux récits bibliques de la création, « le sens véritable ». Et de plus, elle laisse entendre que notre ami Paul aurait l’audace de prétendre que lui va nous y conduire. Évidemment, pour reprendre une expression qu’il utilise souvent, cette phrase ne doit pas être prise « à la lettre ». D’ailleurs, l’auteur apporte quelques nuances un peu plus loin en répondant à la question suivante de Christian : « ne craignez-vous pas d’accommoder les textes sacrés à vos idées préconçues ? Ne leur faites-vous pas dire ce que vous voulez bien qu’ils disent ? » Et l’auteur répond en reconnaissant qu’il y a toujours une dimension subjective dans notre lecture du texte biblique. Mais cette dimension subjective doit tout de même garder un lien réel avec la dimension objective du texte qui est sous nos yeux. Dans cette réponse, il fait référence à la lecture du croyant qui y cherche un sens spirituel. Il va alors préciser que, de son côté, il aborde le texte « dans une perspective philosophique […] pour nourrir la partie rationnelle de mon esprit ».
Le respect de la raison humaine
Cela est important pour bien comprendre l’ensemble de l’œuvre dans laquelle nous entrons. Certaines approches dites « spirituelles » qui se sont développées dans les dernières décennies – comme tout au long des siècles sans doute – semblent verser facilement dans l’irrationnel. Or, l’authentique foi chrétienne, bien qu’elle déborde la raison humaine, ne va jamais contre elle. Contrairement à ce que pense certaines personnes, la foi ne peut pas être à proprement parler « irrationnelle ». Et c’est dans cet esprit que notre auteur cherche à redonner à la foi chrétienne qui aborde les récits bibliques de la création, les fondements rationnels qui permettront au croyant d’aller plus avant dans la compréhension du « sens véritable » de ces récits.
C’est pourquoi notre groupe de travail porte le nom de « pensée nouvelle ». Pour M. Bouchard, il s’agit de dégager « la structure de pensée » qui traverse les récits bibliques. Et il espère ainsi que son approche devienne « très féconde pour la pensée ». Il espère même que son approche puisse permettre à des personnes qui ne partagent par nécessairement la foi chrétienne de pouvoir puiser dans les récits bibliques de la création de quoi alimenter leur réflexion sur l’existence de l’univers et de l’être humain dans cet univers.
Le grand législateur
Un des éléments de ce 4e entretien qui m’intéresse beaucoup est la manière dont il amène à comprendre que « le Créateur a fixé dès l’origine les lois immuables qui font surgir du néant le tissu de base de la réalité concrète ». La logique de notre auteur n’est pas toujours facile à suivre. Mais elle aboutit à une question que toute personne qui réfléchit sur l’univers peut se poser : d’où viennent les lois universelles et immuables qui dirigent les destinées de l’univers ? Par exemple, si on peut développer une théorie scientifique comme celle du Big bang, c’est parce que nous connaissons les lois de la physique. Ces lois sont universelles et immuables. Et c’est en appliquant ces lois que nous développons la théorie. Mais qui a établi ces lois ? Qui est le grand législateur ? Sans tomber dans le concordisme, notre auteur fait un lien entre « la proclamation de principes universels, de lois fondamentales » avec « ce que le ‘Dieu dit’ répété neuf fois dans le récit suggère clairement ».
La structuration de l’être
Et ce sont ces lois universelles qui font en sorte que la matière n’est pas un amas indistinct mais qu’elle se présente sous la forme d’une organisation ultra structurée, ce que l’auteur appelle une « potentialité structurale que la matière originelle ne détient pas d’elle-même mais reçoit du Créateur pour émerger dans la dimension […] de l’ÊTRE ». Ce thème de la structuration de l’être m’est très cher. Sur le présent site web, vous trouverez plusieurs de mes écrits sur ce sujet passionnant. Je l’aborde sous deux angles : dans le temps présent, et dans son déploiement historique. Dans le présent, comment l’être humain est-il structuré d’une manière ultra précise grâce aux « lois universelles et immuables » qui font que les atomes ne sont pas des amas de particules élémentaires, que les molécules ne sont pas des amas d’atomes et que les cellules vivantes ne sont pas des amas de molécules. Dans le déploiement historique, comment chacun de ces niveaux de structuration de l’être ont dû apparaitre au cours du temps puisqu’ils y sont maintenant et que la théorie affirme qu’ils n’y étaient pas à l’origine de notre univers.
Un acte créateur toujours au présent
Cela nous amène, bien sûr, à un autre volet très important qui fonde toute la réflexion de notre auteur et qui nous ouvre à une relecture passionnante des récits bibliques de la création : « Dieu n’a donc pas été Créateur seulement à l’origine, il est maintenant Créateur. Il n’a pas créé l’univers à l’aube de l’espace et du temps, il est, actuellement, dans l’acte de créer l’univers […] Le fait de concevoir l’acte créateur au présent, plutôt que de le projeter à l’origine du temps, peut considérablement révolutionner notre vision de l’univers ». Et ici s’ouvre un dialogue, qui alimentera toute la 2e partie de l’ouvrage de Paul Bouchard, dialogue entre la science et la foi biblique. Ce dialogue ira sans cesse dans un va et vient entre les théories scientifiques actuelles et les récits bibliques immortels. Comment la perception nouvelle d’un univers en évolution nous amène à relire les récits bibliques de la Création. Et comment les récits bibliques de la Création, dans leur solidité toute simple, nous amène à ne pas nous asseoir sur ce que nous croyons savoir de l’histoire de notre univers.
La mesure du temps
Et je termine avec une petite considération pour faire sourire. L’auteur aborde la question bien connue de savoir de quel sorte de « jour » il s’agit puisque, dans le récit biblique, le soleil ne sera créé que le 4e jour. Et certains y voit là un signe certain du fait que les récits bibliques de la création ne sont pas dans la vérité. Mais les scientifiques modernes commettent la même « erreur ». En effet, ils affirment que notre univers a 13, 7 milliards d’années. Mais de quelle année s’agit-il puisque la terre (et sa révolution autour du soleil qui fixe les années) n’est apparue que il y a 4,5 milliards d’années ! -
Cet article arrive en conclusion de la première partie de mon ouvrage. J’ai longuement hésité à proposer cette section (Du Logos à l’atome) à l’entête du livre parce qu’elle constitue à mes yeux une dérogation à l’ensemble de la démarche. Mon écriture, en effet, s’adresse prioritairement à l’incroyant sincère et ouvert pour l’amener au seuil de la conversion en faisant valoir l’admirable cohérence entre la foi chrétienne et la raison scientifique. À première vue, il me semblait que des arguments religieux en guise d’introduction n’était pas la bonne stratégie pour remplir ce mandat.
Dans un deuxième temps, j’ai finalement décidé de maintenir l’ordre actuel des trois parties successives. Ce choix était basé sur le constat que les protaganistes visés (croyant fondamentaliste et incroyant scientiste) justifient leur position sur des prémices erronées concernant la Genèse. Il m’apparaissait alors nécessaire de débrousailler l’écueil des préjugés pour réduire à l’avance les objections infondées de part et d’autre.
L’on comprendra alors que l’argumentaire sommaire et peu développé de cette première partie mériterait un traitement plus exhaustif. Ce qui a été fait dans un ouvrage subséquent que je recommande à quiconque souhaiterait creuser davantage ce vaste sujet : La création : mythe ou réalité – La Genèse décryptée. (Disponible gratuitement au format numérique (PDF) à http://www.boutique@ac3m.org. Pour le format papier (292 pages, 17 X 24.4 cm, 23 $ CAD ou 16 Euro), commander à :
https://www.bookelis.com/religion/53992-La-creation-mythe-ou-realite-.html -
Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours lu la Bible, avec la pensée que j’allais en savoir plus sur mon Créateur. Comme un enfant qui a dû interrompre la lecture d’une histoire et qui s’y remet avec avidité pour connaître la suite, et savoir ce qui advient de ses personnages favoris. Peut-être est-ce dû au fait que très jeune, – environ 6 ans – je bénéficiais de catéchèses et de cours d’histoire sainte tous les jours au pensionnat où j’étais.
Je me souviens de la toute première fois que j’ai ouvert une Bible. Tout mon être participait.Je me tenais très droite et j’ai ouvert le livre très lentement, consciente que j’accomplissais là quelque chose de très important. J’ai ainsi appris, toute jeune, que Dieu, mon Créateur m’aimait puisqu’après voir créé l’homme et la femme, il a mis à leur disposition tout ce dont ils avaient besoin pour vivre. C’est ainsi que moi aussi j’ai commencé à aimer Dieu.
Certes, dans ma lecture de la Parole de Dieu, il m’arrivait d’être étonnée, rebutée même parfois, par le choix des mots et les structures de phrases. Mais j’étais habitée par une telle hâte d’en savoir plus sur Dieu, mon Créateur et l’histoire de l’humanité, que mon cerveau a vite appris à repérer ces difficultés et à les expurger du texte afin de concentrer toute mon attention sur les parties du texte qui m’apportaient du nouveau.
Je suis bien consciente aujourd’hui que cette façon de lire la Parole de Dieu était très subjective, enfantine même, mais je suis convaincue qu’ellle nourissait ma foi.
Bien sûr, avant Darwin, avant que soit accessible la théorie de l’évolution, j’ai «acheté» l’idée que laissait entendre le « scribe inspiré » » d’un univers figé dès l’origine par des déterminismes immuables, un univers qui ne change pas, qui n’évolue pas. » Mais je savais, au fond de moi, que quelque chose n’allait pas. Cette notion d’un « univers statique » laissait tout un tas de questions sans réponses.
Ce n’est qu’après l’an 2000 que j’ai vraiment pris connaissance de la théorie de l’évolution et de toute sa signification, en corrigeant le livre de Paul, « L’Évolution, d’Alpha à Oméga ». J’ai eu le coup de foudre pour sa théorie : « L’évolution, c’est la vision séquentielle d’un unique acte de création étalé dans l’espace et le temps. Un acte qui n’est pas actuellement achevé et ne peut être pleinement compris que par sa destination finale. »
Avec cette vision de Paul, tout se mettait en place dans mon esprit. J’obtenais la réponse à beaucoup de questions. Ce n’est, cependant, ni le moment ni l’endroit ici pour détailler ma pensée. La question est trop vaste. Mais nous aurons sans doute l’occasion d’y revenir.
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