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Christian : Vous projetez de concilier science et foi. Votre entreprise me semble d’avance vouée à l’échec puisque sur la question fondamentale de l’origine de l’univers, les deux points de vue se contredisent. La foi nous apprend que le monde a été créé par Dieu tandis que la science affirme qu’il est apparu à la suite d’une évolution. C’est l’un ou l’autre. On ne peut soutenir deux affirmations contraires en même temps.
— Cher Christian, c’est un truisme d’affirmer que la foi et les sciences ne répondent pas au même questionnement. On a souvent dit que la foi vise le pourquoi de la réalité tandis que les sciences sont concernées par le comment. Ainsi, la question de savoir pourquoi l’homme existe appelle une réponse religieuse. Mais si l’on veut comprendre comment il est apparu sur notre planète, il faut poser la question au paléontologue. Pourquoi ? Comment ? Deux interrogations qui ne se recoupent pas et ne devraient pas entrer en conflit.
Le seul fait, donc, que certains croyants et certains scientifiques puissent estimer inconciliables leurs positions respectives sur les origines de l’humanité dénote un débordement de l’optique fondamentale de chacun. Chacun en effet considère la réalité sous un angle particulier. Celui de la relation de l’homme à Dieu pour le croyant et celui du rapport de l’homme au monde pour le scientifique. C’est pourquoi leurs discours ne se rejoignent pas.
Le croyant antiscientifique rejettera la théorie de l’évolution biologique au nom de sa foi au Créateur. Or, le conflit qu’il perçoit entre évolution et création relève davantage de préjugés culturels que de la théologie. L’incompatibilité qu’il présume tient tout autant d’une représentation erronée de la création que d’une interprétation inadéquate et purement matérialiste de l’évolution.
Le scientifique athée évaluera quant à lui que la découverte des lois physiques – notamment les preuves de l’évolution des organismes vivants – démontre l’inutilité de l’hypothèse d’un Dieu créateur pour rendre compte de la réalité. Cette position est marquée par le scientisme philosophique. Elle s’appuie sur le postulat d’une réduction de la réalité à la matière et la prétention que tout ce qui existe s’explique par ses lois, fussent-elles encore inconnues.
La divergence de vue des deux protagonistes tient en partie de ce qu’ils imaginent un acte créateur dans le temps, le premier pour l’affirmer, le second pour l’infirmer. En réalité, ils ne sont pas en conflit. Ils ne se comprennent tout simplement pas parce qu’ils n’utilisent pas le même langage, l’un celui des sciences pour juger les dogmes de foi, l’autre celui de la foi pour remettre en cause les données scientifiques.
En débordant de leur champ respectif de compétence, les deux se trompent parallèlement et tirent de leurs fausses représentations des conclusions qui empiètent sur un autre terrain de recherche de la vérité, celui de la philosophie. C’est au philosophe que revient la responsabilité de proposer une vision globale de la réalité qui transcende cette opposition. Tant et si bien que sous les deux concepts apparemment conflictuels l’on pourra éventuellement saisir une merveilleuse complémentarité.
Pour accéder à cette synthèse, il importe de commencer par clarifier nos termes. Très cher Christian, puis-je vous demander comment vous concevez le dogme de la création ?
— J’entends que Dieu a créé toutes les réalités, visibles et invisibles ex nihilo, c’est-à-dire à partir de rien. À l’origine, il n’y avait rien en dehors de Dieu. Et par un acte de sa volonté, les réalités sont apparues sans avoir été causées par des réalités antérieures.
— Très bien ! Votre conception de la création propose une solution théologique à l’énigme de l’univers. Je n’en disputerai pas ici la valeur. Elle demeure légitime tant qu’on en reste à la métaphysique. Mais dès qu’on voudra descendre du niveau abstrait pour se situer sur le terrain des phénomènes observables, dès qu’on voudra incarner cette proposition dans l’espace et le temps, l’on pourra se rendre compte qu’elle ne résout rien, qu’elle n’apporte aucune réponse au questionnement sur nos origines biologiques.
Venons-en au fait. Est-ce que je me trompe si je dis que, selon votre position, vous concevez la création comme un événement qui a commencé à se manifester dans le temps, il y a X années, peu importe le nombre ?
— J’admets que l’acte créateur a pu se faire par étapes. La Genèse parle en effet d’une création en six jours. Mais rien n’oblige à interpréter ces « jours » dans le sens de 24 heures, puisque pour Dieu « un jour est comme mille ans et mille ans comme un jour » (2 Pi 3, 8).
— Bien ! Et si l’on veut prendre en considération les connaissances positives actuelles, il faudra plutôt compter ces mille ans par milliards d’années, n’est-ce pas ? Donc, d’après votre raisonnement, si Dieu a créé ce qui existe directement dans le temps, il a forcément créé les réalités les unes après les autres. Entre chaque acte créateur, il a pu se passer de très grands laps de temps, par exemple, avant que notre Soleil ait été créé dans notre galaxie de la Voie lactée. D’autres périodes, énormes à notre échelle, ont dû s’écouler avant la formation des planètes et avant que la nôtre ait été suffisamment refroidie pour recevoir les organismes vivants, tant les plantes que les animaux. Finalement, disent les scientifiques, si l’on condensait cet immense écoulement de temps à l’échelle d’une journée de 24 heures, l’on pourrait calculer que l’humanité est apparue sur la Terre à une fraction de la dernière seconde de la dernière heure.
Mais il ne s’agit pas ici d’une discussion sur l’âge de l’univers. Plutôt de prendre conscience de l’inadéquation de la conception de la création ex nihilo dans le temps. Elle ferait dire, par exemple, que le cheval, à un moment donné, aurait surgi subitement parmi les phénomènes terrestres comme venant de nulle part. Un cheval parfaitement bien formé — un adulte avec sa femelle forcément — survenu miraculeusement parce que créé par Dieu à partir de rien pour être le géniteur de tous les chevaux qui sillonneront notre planète jusqu’à la fin du monde. Et il en serait ainsi pour toutes les espèces animales et végétales, tant celles qui existent encore que celles qui sont éteintes. Chaque espèce serait survenue comme par miracle en des lieux différents de la planète et à d’énormes intervalles de temps, si nous tenons compte de l’âge des fossiles d’espèces aujourd’hui disparues.
D’emblée, l’on peut se rendre compte qu’une telle interprétation concrète de la création n’a pas de sens. Non seulement entre-t-elle en conflit avec les connaissances acquises par les sciences positives mais elle est indigne de Dieu, qui est ainsi ravalé, pour les besoins de la cause créationniste, au niveau d’un fabriquant de formes vivantes à coups de baguette magique. De plus, elle heurte le bon sens basé sur l’expérience commune de la réalité. Dans l’espace et le temps que nous expérimentons, il n’existe pas de réalités concrètes qui surviennent sans être causées par une réalité antérieure de même niveau, même si l’ignorance des causes efficientes a pu faire croire parfois à des interventions surnaturelles.
Un jour, Dieu aurait décidé de créer le tyrannosaure. Il aurait fabriqué pour le reptile des dents bien acérées et des mâchoires féroces, capables de mettre en pièces ses rivaux et faire une bouchée des petits mammifères qui essaieront de survivre sur son sillage. À une autre époque, à des millions d’années de distance, il n’y avait pas encore de lion mais le Créateur aurait dessiné les griffes et les crocs du fauve de telle manière qu’il parvienne à saisir et à dévorer la biche et son petit. Il n’y avait pas de vipère mais Dieu, sans doute de mauvaise humeur ce jour-là, en aurait fait surgir une du néant qui sache sécréter son venin mortel pour les animaux et les hommes.
— Votre présentation des actes créateurs n’est-elle pas caricaturale ?
— Ce que je veux faire valoir, cher ami, c’est que la création ex nihilo est une notion qui ne peut s’appliquer à la dimension spatio-temporelle. Elle ne peut s’interpréter dans le sens que Dieu aurait créé à l’origine des modèles d’organismes vivants dont proviendraient tous les individus de la même espèce.
Si telle était l’interprétation qu’il faille donner à l’acte créateur, aucune progéniture de chaque espèce ne pourrait être dite créée, puisque seuls les premiers organismes auraient été façonnés directement par Dieu, les autres résultant de leur fécondité. Or, la foi ne nous impose-t-elle pas de croire que nous avons été créés, chacun en particulier, par un acte de la volonté de Dieu ? N’avons-nous pas tous raison d’appeler Dieu notre Créateur ? Et pourtant, si l’on considère le strict plan biologique, nous sommes tous venus au monde à partir d’une cellule fécondée de nos parents. Ce qui ne contredit nullement la notion que nous ayons été voulus expressément par Dieu, n’est-ce pas ?
Eh bien ! il en est de même pour la discussion sur les origines. Le fait que des organismes aient pu évoluer et se transformer pour aboutir éventuellement à de nouvelles espèces n’infirme en rien le dogme de la création. Car l’acte créateur se situe sur un autre plan que celui de l’engendrement biologique.
— Au commencement, Dieu a créé chaque espèce. Le livre de la Genèse, au chapitre 2, verset 19, est formel sur ce point. « Le Seigneur Dieu modela du sol toute bête des champs et tout oiseau du ciel ».
— Justement, dans ce passage, ce n’est pas la création ex nihilo dont il est question. Il est bien dit que Dieu a créé les diverses espèces à partir « du sol ». Que faut-il entendre par là ?
Si l’on veut se situer encore une fois au niveau des phénomènes concrets de la réalité, peut-on vraiment croire que Dieu aurait utilisé de la terre pour former les premiers organismes ? S’il en était ainsi, les espèces seraient apparues les unes à la suite des autres. De sorte que si l’on avait pu observer la scène, l’on aurait pu voir surgir du sol la forme du mammouth et celle de son successeur, l’éléphant, la forme du crocodile qui, aussitôt animé de vie se serait précipité dans le premier marais venu, celle de l’infime moucheron et celle de la baleine, les formes des divers micro-organismes comme celles des dinosaures aujourd’hui disparus.
Il est clair que l’auteur de ce passage n’a pu viser un tel sens littéral. Car il passe à côté de l’enseignement véritable qu’il a voulu transmettre. Par l’image du sol, n’a-t-il pas plutôt voulu faire comprendre d’abord que les organismes vivants, aussi bien les hommes que les animaux, sont faits à partir d’un même matériau de base, soit la matière ? Plus loin dans ce livre, l’auteur lui-même confirme cette interprétation lorsque Dieu s’adresse au premier homme après la chute.
À la sueur de ton visage tu mangeras du pain jusqu’à ce que tu retournes au sol car c’est de lui que tu as été pris. Oui, tu es poussière et à la poussière tu retourneras (Gn 3, 19).
Le mot poussière était le terme le plus approprié de la culture de l’auteur pour traduire sa pensée. Aujourd’hui, il aurait sans doute utilisé le concept de matière. Paraphrasons : Tu es matière et à la matière tu retourneras.
On ne peut donc pas s’appuyer sur la Genèse pour soutenir la doctrine de la création ex nihilo dans le temps. En fait, le premier livre de la Bible favorise davantage la théorie de l’évolution que la thèse créationniste. Et il n’y a pas que l’utilisation par Dieu du médium de la matière qui l’indique. Le sixième jour, celui de la création des animaux et des humains, Dieu déclare : « Que la terre produise des êtres vivants selon leur espèce ». Le fait que Dieu ordonne à la terre de produire les « êtres vivants » ne permet-il pas de conclure à l’engendrement naturel — et non miraculeuse — des diverses espèces ? Car c’est « la terre » qui les produit. En d’autres mots, Dieu donne à notre planète la faculté de les engendrer. Ce qui laisse tout le jeu utile à une création qui se déploie selon un modèle évolutif. Au deuxième chapitre, d’ailleurs, Yahvé façonne tant les animaux que le premier homme à partir de « la glaise du sol ».
Yahvé Dieu modela l’homme avec la glaise du sol… Yahvé Dieu modela encore du sol toutes les bêtes sauvages et tous les oiseaux du ciel (2, 7.19).
L’activité créatrice est assimilée au travail d’un potier qui donne une forme à la glaise. La comparaison est significative. Le fait que le Créateur se serve de l’argile pour créer les organismes vivants implique nécessairement l’utilisation d’un médium, d’un élément déjà existant. Ce qui est spécifiquement créé, ce n’est pas « la glaise du sol », soit la matière, mais la “forme” des vivants, modelée par le pouvoir de l’Artiste créateur.
Derrière les limites culturelles de ces formulations, ne peut-on pas saisir l’affirmation que Dieu crée les êtres vivants en passant par le jeu naturel des causes secondes, que la matière — dont Dieu a édicté les lois — impose à la réalité ? Voilà donc un autre verset biblique très favorable à la théorie de l’évolution.
D’autre part, les humains et les animaux ont été créés le même jour, soit le sixième. Ce qui laisse supposer que les espèces vivantes, selon la Genèse, sont apparentées. Une induction qui rejoint encore l’hypothèse de l’évolution selon laquelle les organismes vivants ont une souche biologique commune, l’homme inclus, puisque, par son corps, il appartient au règne animal.
Notons que, selon l’auteur du premier récit, l’homme se démarque des autres animaux par une intention spéciale de Dieu, qui le veut « à son image, à l’image de Dieu, il le créa » (1, 27). Ici encore, l’auteur se réfère à la forme et non au matériau accidentel dont l’homme est fait. De toute évidence, il ne peut s’agir d’une image physique mais plutôt d’une image spirituelle. Ce n’est pas le corps de l’homme qui porte la ressemblance de Dieu mais la dimension spirituelle de son être, son âme vivante. Dans le deuxième récit, l’homme est créé le premier, avant les animaux et les végétaux. Ce qui peut indiquer que Dieu vise l’homme dans son plan de création et que tout a été fait en vue de son émergence.
Alors Yahvé Dieu modela l’homme avec la glaise du sol, il insuffla dans ses narines une haleine de vie et l’homme devint un être vivant (2, 9).
Nous avons ici une distinction capitale : la glaise pour expliquer le corps par les causes efficientes ou secondes, et le souffle pour rendre compte de l’essence vitale. Lorsque le christianisme enseigne que Dieu a créé tous les êtres à partir de rien, il ne fait sûrement pas allusion à la « glaise ». C’est du « souffle », du feu intérieur de la vie dont il est question. Ou plutôt, ne serait-il pas plus adéquat d’affirmer que toute vie est créée à partir d’un Dieu qui fait don de lui-même ? Car ce souffle qu’il insuffle en Adam, n’est-ce pas en un sens une part de son Esprit ? C’est par son Esprit qu’il donne à tous les êtres leur « haleine de vie » et, particulièrement dans le cas de l’homme, la « ressemblance » de Dieu.
Cette interprétation ouvre la porte d’une inépuisable méditation. Elle suscite des interrogations fondamentales. Qu’est-ce que la vie ? Qu’est-ce que la matière ? Des questions qui interpellent tant le philosophe et le scientifique que le croyant. Nous aurons l’occasion d’y revenir plus loin dans notre conversation avec Albert, mon prochain interlocuteur. Pour l’heure, définissons provisoirement la matière comme tout ce qui tombe à l’extérieur de la conscience que nous avons d’exister. La matière, c’est l’extériorité par opposition à l’intériorité des choses. La matière est ce tissu serré des réalités extérieures qui traversent de part en part le monde tangible pour le constituer. Elle est cet enchaînement ininterrompu de causes et d’effets de l’espace-temps.
Approfondissons et résumons ! L’image de Dieu modelant les êtres vivants à partir « du sol » ou de la « glaise » revient à dire que Dieu, à notre niveau de perception de la réalité, passe par l’évolution de la matière et l’enchaînement des causes secondes pour accomplir son dessein créateur dans l’univers.
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5 réponses à “1- Création ex nihilo”
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Ce premier entretien mériterait d’être commenté ligne par ligne tant il est dense et important. Voici déjà quelques réflexions..
« Le croyant rejettera la théorie de l’évolution biologique au nom de sa foi au Créateur. »
Il faudrait ajouter ici un attribut au « croyant » dont il est question, comme il le fera au paragraphe suivant en parlant du « scientifique athée ». Car il est évident que tous les croyants ne rejettent pas la théorie de l’évolution biologique.
« L’incompatibilité qu’il présume tient tout autant d’une représentation erronée de la création que d’une interprétation inadéquate et purement matérialiste de l’évolution. »
Ici s’ouvre le véritable dialogue. Dans tout cet ouvrage qui commence, notre auteur veut amener le lecteur, quel qu’il soit, à clarifier ses « croyances » : quelle représentation se fait-il des récits bibliques de la création ? Et quel regard porte-t-il sur les théories de l’évolution ?
« Le scientifique athée évaluera quant à lui que la découverte des lois physiques – notamment les preuves de l’évolution des organismes vivants – démontre l’inutilité de l’hypothèse d’un Dieu créateur pour rendre compte de la réalité. Cette position est marquée par le scientisme philosophique. Elle s’appuie sur le postulat d’une réduction de la réalité à la matière et la prétention que tout ce qui existe s’explique par ses lois, fussent-elles encore inconnues. »
La question des « lois » de la physique et de toutes les autres disciplines scientifiques méritera un dialogue plus approfondi. En effet, affirmer la réalité de ces « lois » universelles et immuables c’est poser la question du « législateur ». On peut, bien sûr, éviter d’aborder cette question. Mais on ne peut pas repousser du revers de la main les personnes qui se la posent. En fait, il m’apparaît assez évident que l’existence même de la science est déjà une « preuve » de l’existence de Dieu. Et plus la science prétend appuyer ses dire sur des « preuves », plus elle « prouve » que Dieu existe. Mais, pour le croyant, la question ne porte évidemment pas tant sur « l’existence » de Dieu que sur la relation que nous pouvons avoir avec lui.
« En débordant de leur champ respectif de compétence, les deux se trompent parallèlement et tirent de leurs fausses représentations des conclusions qui empiètent sur un autre terrain de recherche de la vérité, celui de la philosophie. C’est au philosophe que revient la responsabilité de proposer une vision globale de la réalité qui transcende cette opposition »
Il me semble que notre auteur donne ici à la philosophie, et à la raison humaine, une bien grande mission. D’ailleurs, l’apparition ici d’un « 3e interlocuteur » peut surprendre. Pourquoi le croyant ouvert aux lumières de la science, ou le scientifique ouvert aux lumières de la foi ne pourraient-ils pas, eux-mêmes, « proposer une vision globale de la réalité ». En fait, l’auteur parle ici de lui-même. C’est lui, le philosophe, qui entreprendra un dialogue avec Christian le croyant, Albert le scientifique et Ève l’amoureuse. Et dès la fin de ce premier entretien, tout ce beau monde sera réuni dans cette affirmation qui ouvre au dialogue : « Des questions qui interpellent tant le philosophe et le scientifique que le croyant ».
En fait, notre auteur pose ici une pierre fondamentale de toute la réflexion qui s’ouvre. Il affirme sa confiance en la raison humaine. Plus encore, toute son œuvre vise à redonner à la raison humaine ses lettres de noblesse. Notre auteur croit de toute son âme que la raison humaine, et donc tout être humain qui laisse sa raison être éclairée simplement par les lumières de la foi et de la science, peut parvenir à cette « vision globale de la réalité ». De plus, il croit qu’une telle vision contribuera réellement à l’établissement de la civilisation de l’amour sur notre terre. Et c’est dans cet esprit que le « Groupe de Travail Pensée Nouvelle » veut apporter sa très modeste contribution à une œuvre si grandiose. -
Je poursuis ici mon commentaire du 7 novembre.
L’auteur présente ensuite une interprétation du récit biblique de la création qu’il prétend être un exemple d’approche créationniste. Cette présentation étrange mérite la réplique de Christian : « — Votre présentation des actes créateurs n’est-elle pas caricaturale ? » En fait, ce qu’il présente sert moins « la cause créationniste » qu’un concordisme de mauvais aloi. D’ailleurs il faudrait préciser ce qu’on entend par « créationniste » car ce mot est plutôt un épithète péjoratif que des personnes accolent à d’autres personnes sur lesquelles elles portent un jugement. Pour les personnes ayant une approche créationniste en général, selon ce que j’en comprends, les espèces animales ont toutes été créées par Dieu au même moment, et non pas sur des millions d’années. D’ailleurs, l’apparition des espèces animales à des millions d’années d’intervalle est une question qu’il faudrait plutôt poser aux scientifiques. Car cette réalité de la « spéciation » est complexe et n’est pas claire du tout dans la « théorie synthétique de l’évolution ». Pour le créationniste, donc, la question de savoir si Dieu a créé un couple de chaque espèce ou plusieurs n’a pas de réponse. Et de toute façon, il aurait été préférable de laisser la parole à Christian sur ce point. C’était à lui de présenter sa version des faits, comme c’est aux créationnistes de le faire. Et de plus, la croyance que Dieu a créé toutes les espèces animales en même temps il y a quelques milliers d’années peut faire sens pour des personnes. Je ne partage pas l’opinion de M. Bouchard qui affirme que cela « n’a pas de sens ». Cela s’oppose évidemment aux connaissances scientifiques actuellement communément admises, mais il est bon que des questions soient ainsi posées pour obliger les scientifiques à approfondir leurs connaissances et à les appuyer de manière toujours plus solide.
Dans les dernières années, une partie de courant créationniste a évolué vers ce qu’on appelle, en anglais : « intelligent design ». Dans cette approche, on évite d’affronter de front les découvertes scientifiques. Et lorsqu’on le fait, on le fait sur le plan purement scientifique, et non pas par des arguments liés à la Bible ou à nos croyances. Pour le reste les tenants du « dessin intelligent » (traduction littérale) affirment simplement que toutes les lois que découvrent la science sont la manifestation du dessin de Dieu et de son intelligence à l’œuvre dans l’univers.
Et pour ne pas trop s’étendre sur ce point, j’ajoute simplement ceci. Je suis mal à l’aise avec l’affirmation de l’auteur : « le premier livre de la Bible favorise davantage la théorie de l’évolution que la thèse créationniste ». Encore une fois, il faudrait définir les termes. De quoi parle-t-on lorsqu’on parle de « la théorie de l’évolution » ? J’imagine qu’on fait ici référence à « la théorie synthétique de l’évolution des espèces ». Et comme nous l’avons dit plus haut, de quoi parle-t-on lorsqu’on parle de « thèse créationniste » ? De toute façon, la suite du livre nous aidera bien sûr à mieux préciser tout cela. -
Je termine en attirant l’attention sur deux éléments très importants que notre ami met en lumière dans ce premier entretien.
« Le sixième jour, celui de la création des animaux et des humains, Dieu déclare : « Que la terre produise des êtres vivants selon leur espèce ». Le fait que Dieu ordonne à la terre de produire les « êtres vivants » ne permet-il pas de conclure à l’engendrement naturel — et non miraculeuse — des diverses espèces ? Car c’est « la terre » qui les produit. En d’autres mots, Dieu donne à notre planète la faculté de les engendrer. Ce qui laisse tout le jeu utile à une création qui se déploie selon un modèle évolutif. »
Il est important de prendre note de ce fait. Le premier récit de la création indique que c’est la terre qui produit les êtres vivants, et le second indique que Dieu façonne les êtres vivants à partir de la glaise du sol. Cette indication alimentera une bonne partie de notre réflexion postérieure.
Enfin, notre auteur termine par une inspiration pleine de lumière. Là où nous avons l’habitude d’affirmer que Dieu a tout créé « à partir de rien », M. Bouchard dira :
« Ne serait-il pas plus adéquat d’affirmer que toute vie est créée à partir d’un Dieu qui fait don de lui-même ? Car ce souffle qu’il insuffle en Adam, n’est-ce pas en un sens une part de son Esprit ? C’est par son Esprit qu’il donne à tous les êtres leur « haleine de vie » et, particulièrement dans le cas de l’homme, la « ressemblance » de Dieu. Cette interprétation ouvre la porte d’une inépuisable méditation. »
AMEN. -
Cet article, Création ex nihilo, est très sommaire. J’admets que l’exposé mériterait un traitement plus élaboré. Mais tout comme chaque entretien subséquent, il faudrait un livre entier pour couvrir tous les angles du sujet traité… C’est donc délibérément que j’ai choisi de m’en tenir à des généralités. Car un traitement détaillé de chaque entretien aurait rendu infaisable la rédaction de L’évolution d’Alpha à Oméga.
L’arbre cache la forêt, dit-on. L’inverse est également vrai. Pour cerner la forêt dans son ensemble, une distance de chaque espèce particulière est requise. Ma rédaction vise à projeter une vision à vol d’oiseau qui n’a pas à contourner les obstacles et les détours de la route au niveau terre à terre.
Cela dit, je puis admettre qu’une telle perspective aérienne n’est pas toujours facile à suivre. Des questions légitimes peuvent surgir en cours de lecture en raison des inévitables raccourcis de l’exposé. Elles devront attendre un éventuel développement disséminé dans l’ouvrage pour que la trame sous-jacente des expressions soit éclairée.
C’est le cas notamment pour les termes “créationnisme” et “évolutionnisme” de ce premier entretien. Qu’est-ce qu’ils impliquent dans le contexte ?
Ici s’amorce le travail des participants au GTPN. L’occasion est belle pour dépasser une simple lecture superficielle et sans conséquences du texte. Pour ce faire, chacun dispose d’un outil formidable à sa portée : l’internet. La bande de recherche du navigateur donne accès en un clic à une panoplie d’articles qui explorent les tenants et aboutissants d’un sujet ou d’un simple mot.
Cette surabondance d’informations, pertinentes ou non pour notre recherche, ne dispense pas, cependant, de la nécessité d’effectuer un solide discernement sous l’éclairage de l’Esprit. C’est une priorité, pour le Groupe de Travail pour une Pensée Nouvelle, de chercher la voie lumineuse apte à réconcilier les conflits et les irréductibilités.
(Pour un approfondissement voir dans Propos complémentaires l’article suivant: https://www.civilisation-amour.org/creationnisme-vs-evolutionnisme/ ainsi lque deux articles sur le Dessein Intelligent intitulées 1- La petite guerre entre foi et sciences https://www.civilisation-amour.org/1-la-petite-guerre-entre-foi-et-sciences/ et https://www.civilisation-amour.org/2-la-petite-guerre-entre-foi-et-sciences/ -
Je n’arrive pas à écrire un commentaire sur la Création ex nihilo, parce que je suis obsédée par le commentaire de Jean-Marie suite à la lecture de l’introduction. «Je me questionne depuis des années sur l’existence de Dieu, écrit-il. Parfois j’arrive à entrouvrir des portes qui aussitôt se referment. Je compte beaucoup sur votre aide pour me guider, en particulier sur toi Paul.»
Je suis surprise qu’aucun de vous n’ait réagi à ses propos. Si l’on veut développer une Pensée nouvelle qui servirait de base à une Civilisation de l’amour, me suis-je dit, je ne peux, dès le départ, ignorer l’appel à l’aide d’un participant. Car il faut éviter que nos échanges ne soient qu’un exercice de sémantique dont les énoncés resteront suspendus dans l’éther et sans répercussion, faute d’être confrontés au terreau de la réalité. Je fais donc ce plongeon dans le concret pour tendre la main à notre ami.
Cher Jean-Marie, alors que je n’avais pas la foi et que j’en discutais avec un ami, ce dernier me demande de but en blanc, si j’ai connu mon arrière grand-père, je lui réponds que non. Crois-tu qu’il a existé ? poursuit-il. Bien sûr que oui, lui dis-je, sinon je ne serais pas née. Eh bien, conclut mon ami, c’est la même chose pour l’existence de Dieu. Tu ne l’a jamais rencontré, mais il existe et il t’aime. Et mon ami a mis ses mains sur mes épaules et il a prié Dieu pour que je reçoive le cadeau de la foi.
Ça peut apparaître simpliste, mais n’empêche que je suis retournée chez moi avec l’impression que quelque chose de nouveau s’était passé dans ma vie, que quelqu’un m’habitait. Bien sûr je vivais là le début d’un long cheminement. Pour garder ce Quelqu’un présent en moi, il a fallu que je lui fasse de la place pour qu’Il sache que je voulais l’accueillir. j’ai dû faire un grand ménage dans mon cœur. Cela a été, Jean-Marie, le début d’une belle aventure qui se poursuit encore aujourd’hui. Il faut savoir que mon ami a beaucoup prié pour moi à cette période afin que je laisse entrer Jésus dans ma vie.
Sache donc, mon ami, que depuis que je vous ai rencontrés, ton épouse et toi, je prie pour vous tous les jours.
Dis, Jean-Marie, as-tu connu ton arrière grand-père ?
Heureusement, il y a une suite à cet entretien qui laisse en suspens la question du “quand” et du “comment”…
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